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Lettre aux amis du Sycomore #6

Pontchâteau 12 Juin 2022

Comment faites-vous pour vous protéger ?

C’est la question qu’une stagiaire nous a posée, à la suite d’un événement soudain et douloureux survenu au sein de la maison. Question pertinente, qui vient interroger notre capacité à traverser, dans la durée, les épreuves rencontrées dans le cadre de cet accueil des plus fragiles. Bien sûr, comme chacun de nous, il nous appartient de connaitre nos forces comme nos limites, de nous réserver des temps en solitude, en couple, en famille ou avec des amis, de nous ressourcer par des activités qui nourrissent ou aèrent l’esprit et le corps. Mais cette question nous entraîne plus loin : que faites-vous de la souffrance qui surgit des cœurs déchirés ? comment faites-vous pour ne pas vous laisser submerger ?

Ce que nous crient nos frères et sœurs blessés, ce qu’ils nous manifestent de mille et une manières ou nous énoncent parfois très explicitement, c’est leur soif d’être aimés. Alors, comment aimer en se protégeant ? se protège-t-on de ses amis, de ses proches, de tous ceux que l’on aime ? certainement pas. On se protège du mal, pas d’une personne et encore moins d’un ami, surtout s’il est fragile.

Si nous voulons aimer jusqu’au bout, nous devons donc accepter de nous rendre vulnérables, de nous laisser atteindre, de renoncer à toutes nos sécurités, d’accueillir la souffrance, de pâtir avec et finalement de ne plus nous appartenir. Imagine-t-on Jésus se demander comment se protéger ? non. Il est tout donné à son Père, et dans le même mouvement, tout donné aux hommes. Sans retenue, sans calcul, sans limite. Jusqu’à tout perdre : ses amis, son honneur, sa réputation, sa vie.

C’est à cela qu’il nous invite tous avec Lui et c’est pourquoi un tel chemin est impossible sans Lui. Nous sommes foncièrement incapables de porter nous-mêmes des personnes qui souffrent terriblement, mais nous pouvons tous leur ouvrir notre cœur et les déposer aux pieds de Jésus. La voici donc, notre protection la plus radicale et la plus efficace : adorer Jésus tous les matins, dans le silence du jour naissant, lui redire notre pauvre amour, notre foi et notre espérance et lui demander de nous apprendre à aimer chacun comme Lui nous aime.

La souffrance ne disparaît certes pas comme par enchantement. Elle est toujours bien présente mais elle peut désormais être offerte, transfigurée et même féconde. Un cœur sans protection devient vite un cœur transpercé. Alors, et seulement alors, le Seigneur peut en faire jaillir la vie.

Nous vous embrassons avec toute notre affection,

Patrick & Hélène

Responsables du Sycomore